Les données extérieures du projet

Sur le choix de l’emplacement Henri Gautier fait observer qu’il faut se conformer à la situation des lieux et aux passages, « quelques difficultés qu’on y rencontre » et que les recommandations de Palladio sur la recherche d’un emplacement présentant de bonnes caractéristiques de fondation et d’écoulement de la rivière (eau peu profonde, chenal rectiligne sans gouffre ni tourbillons …) ne peuvent constituer une règle générale.

L’emplacement ainsi déterminé ou le plus souvent imposé, il convient :

  • de « lever un plan du local » qui soit fort juste ;
  • de prévoir un axe de l’ouvrage orthogonal à la brèche. Tout biais est proscrit à cause de la complexité de la taille des voussoirs (« la fausse équerre de la coupe des pierres qui portent à faux »)
  • de relever par enquête auprès des riverains ou des « maîtres de pont » sur les rivières navigables la ligne des plus basses eaux et la plus grande hauteur des inondations,
  • de sonder la profondeur d’eau de toise en toise (environ tous les 2 mètres) à l’aide d’une perche ou d’une corde lestée par un boulet,
  • de procéder à des reconnaissances du sol d’appui à l’aide de trois outils :
  • la sonde de fer battue qui préfigure le pénétromètre moderne et qu’il suggère de munir d’une pointe à quatre angles de manière à remonter de « petits brins de terrain » ;
  • la tarière au bout en forme de limaçon,
  • dans les sols caillouteux le pieu de chêne de 3 à 6 pouces (8 à 16 centimètres) de diamètre,

• de rechercher les matériaux de construction (pierre, bois) disponibles localement.

La démarche de recueil des contraintes et données du projet est donc tout à fait complète et Henri Gautier souligne l’importance de ces recherches, en une remarque qui est toujours d’actualité

« Tout cela ne se peut faire sans beaucoup de soins et de circonspection et sans quelques dépenses, mais aussi on a la satisfaction de bien faire et de rapporter fidèlement sur le profil la profondeur du sable ou du gravier que l’on doit piloter ou que l’on doit enlever pour la fondation des piles afin d’y asseoir les batardeaux convenables et tant qu’on ne sait pas cette profondeur on ne peut point projeter un pont, on ne voit point clair, on ne peut pas en dresser l’état de dépense puisque l’on ne sait pas jusqu’où porteront les bois ni quelle précaution on peut prendre pour la sûreté de l’ouvrage ».

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