C’est avant tout par leurs fondations que les ouvrages périssaient. Henri Gautier rappelle les quatre types de fondation selon Scamozzi
- dégagement d’un niveau de fondation à l’intérieur d’un batardeau avec renforcement au besoin par « pilotage » (petits pieux)
- grilles ou radeaux lestés échoués,
- dérivation du lit d’étiage,
- rescindement de méandre avec construction préalable du pont à l’emplacement du nouveau chenal.
II cite l’expérience de Blondel au pont de Saintes : radier général constitué d’une grille de bois de chêne de 12 pouces, de madriers et de maçonneries, construit à l’abri de batardeaux.
Mais son expérience poussée (pont de Coursan, de Cesse, bâtiment des Gabelles à Peccaïs, écluse de Sylveréal …) permet à l’auteur de développer ses propres recommandations en distinguant pour l’essentiel deux cas : les fondations sur du roc et sur des sols mollasses.
II commence par rappeler l’importance de tout abaissement préalable du plan d’eau par effacement des barrages aval éventuels, surcreusement du lit d’étiage, voire dérivation du cours d’eau.
Les batardeaux, souvent nécessaires, sont décrits dans le détail. Si pour les canaux et fosses des batardeaux en terre sont en général suffisant, les travaux en rivière imposent de plus grandes précautions. Le batardeau sera alors composé de deux rangées de pieux et « pals à planche » raidis par des « raines » ou liernes. Les pieux et pals à planches seront fichus d’au moins le quart de la hauteur à retenir. La largeur du batardeau (entre les files de pieux) sera au moins égale à la hauteur d’eau à retenir. L’espace intermédiaire est garni d’un corroi de terre glaise. Les épuisements, manuels, se faisaient par chapelets, baquets, vis sans fin … Henri Gautier recommande la méthode la plus rustique, le baquet à deux anses.
Dans le cas de sol de faible consistance, la technique de fondation recommandée est le gril de madriers avec pilotage de remplissage. Pour lutter contre les affouillements l’ensemble sera encagé (crèche) grâce à des pilots et pals à planches latéraux (cf. planche XX et planche XXI).
Sur les sols très compressibles de Camargue, Henri Gautier a mis en œuvre :
- le préchargement pour le bâtiment des gabelles à Peccaïs. Sur une plate-forme de « sommiers » de sapin pourvus de « racinaux », il monte avec redans une fondation élargie de 2 prévus initialement à 8 pieds, puis toujours avec redans la maçonnerie jusqu’au rez-de-chaussée et la charge de 30% de plus que la masse du bâtiment en élévation. Lequel construit « quelques temps après » ne représenta que des « rizées ou lézardes » de peu d’importance,
- la prévision des tassements dans le cas de l’écluse de Sylveréal. Estimés par lui à 6 pouces (environ 16 centimètres), le tassement des maçonneries fondées sur pilots de 16 à 18 pieds et pals à planches de 12 pieds s’est élevé à 5 pouces.
L’auteur du traité insiste et c’est toujours d’actualité sur la surveillance et l’entretien des fondations. Après chaque crue, un sondage doit être effectué pour déterminer les affouillements. Le renforcement se fera le plus souvent par déversement de blocs, mais aussi par battage d’un nouveau batardeau enveloppant la fondation menacée.
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