Il serait difficile de comprendre comment la cité volque arécomique de Nîmes aurait profité de la bienveillance de l’empereur Auguste si l’on méconnaissait le contexte protohistorique, économique et politique qui précédait la colonisation romaine.
On pourrait, pour résumer, s’attacher au contexte général et au contexte local.
La région de Nîmes se situe près du centre de la branche horizontale d’un T majuscule renversé qui représente les grandes voies de communication entre mer et montagnes ou entre montagnes : les voies littorales qui permettaient de se rendre de Rome en Espagne – doublées d’ailleurs d’une voie maritime – et la voie rhodanienne qui mettait en communication avec le nord de la France actuelle et les pays du nord. Ces voies utilisées jadis par d’autres peuples méditerranéens : les Grecs, les Etrusques, les Massaliotes, commerçants ou militaires étaient jalonnées de ports et de bases administrées par des populations indigènes qui ont appris à s’organiser.
- Des ports : Agde à l’embouchure de l’Hérault, comptoir grec dépendant de Marseille, Lattes au milieu des étangs et à proximité du delta du Lez (de l’époque), Arles sur le Rhône, la vallée du Rhône pour commercer avec les pays du nord, producteurs d’étain, mais encore des bases sur la lagune : Le Cailar, Saint-Gilles, à une époque où les deltas des fleuves côtiers (Vidourle, Lez) débouchaient dans un immense étang qui s’est fractionné ensuite.
- Des bases. Durant le premier millénaire avant J.-C., apparaissent les oppida : à Nîmes sur le versant sud du mont Cavalier et autour de la Fontaine, à Marduel au bord du Gardon, à l’est ; dans la Vaunage, à Roque de Viou, plus tard à Nages et tout autour de ces sites particulièrement bien situés pour surveiller et contrôler les passages, les agresseurs, les transitaires, les commerçants. D’abord construites en matériaux légers et périssables comme à la Roque de Viou, ces habitations devinrent des demeures solides, en pierre sèche, alignées le long des rues, protégées par des enceintes. Ce furent les Gaulois du Midi sur lesquels l’archéologue Michel Py a écrit des ouvrages fort documentés.
Combien de commerçants ont fréquentés ces oppida, combien d’armées sont passées à leur pied, dont celle d’Hannibal par exemple ? Organisées, ces populations dites des Volques arécomiques qui occupaient à peu près le territoire actuel du département du Gard, avaient choisi pour capitale la cité de Nemausus.
Mais l’oppidum de Nîmes prit plus d’importance. On le signala dès le III e av. J.-C. par une enceinte dominée par une tour pleine qui devint plus tard la tour Magne. En 118 av. J.-C., l’une des voies antiques, reliant Rome à l’Espagne, fut améliorée : la voie Domitienne devint le passage obligé des transactions entre Rome et les comptoirs ibériques. On frappa monnaie. César s’y abrita pendant la guerre des Gaules. Le site de la Fontaine et son temple dit « de Diane », lieu cultuel, devint un sanctuaire. Plus tard, vers 15 ap. J.-C., Auguste entreprit la construction d’une nouvelle enceinte de 6 km, se confondant par endroits avec la précédente. Il doubla la tour pleine d’une d’une enveloppe en pierre, ce fut la tour Magne. Le sanctuaire indigène devint Augusteum, lieu de culte impérial. La cité devint colonie latine, avec son forum, son théâtre et la célèbre maison Carrée (2 – 4 ap. J.-C.) dédiée aux petits-fils de l’empereur. Bien que la ville possédât de nombreux points d’eau : sa source, de nombreux puits, on décida pour améliorer le confort de ses habitants, d’y transporter l’eau à partir d’Uzès par un aqueduc monumental. De l’eau sous pression, des égouts, des thermes, des honneurs … c’est à ce prix, moyennant quelques distinctions, qu’on acquiert la paix sans user de la force.
L’amphithéâtre et les thermes vinrent plus tard, fin du premier siècle, début du IIe . Dès lors avec sa source, ses eaux, ses thermes, son théâtre, son amphithéâtre, son administration à la romaine, son Augusteum, la cité volque devint la Rome française.
Pour en savoir plus :
Darde Dominique, Nîmes antique, Ed. du Patrimoine, 2005
Lassalle Victor, La Fontaine à Nîmes, Ed. Cadran, 1967
Pey Jean, Fabre Guilhem, Fiches Jean-Luc, L’eau à Nîmes, Presses du Languedoc, 1994
Py Michel, Les Gaulois du Midi, Hachette, 1993,
Nique Christian, Précis d’histoire du Languedoc-Roussillon, CRDP Montpellier, 2007.
Eric Teyssier, Nîmes, la romaine, Ed. Alcide, Nîmes, 2014
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