Le Gardon n’a pas failli à sa réputation et a fait parler de lui dès la première année du chantier
- une crue du 29 août 1743 détruisit 35 à 40 quintaux de pierres taillées,
- une crue du 25 octobre 1743 endommagea le pont de bateaux et creva la digue de l’Estel ; elle noya la carrière, ce qui nécessita des pompages pour la remettre en service,
- enfin toujours la même année, décidément maudite pour les entrepreneurs, les 6, 13 et 20 novembre 1743, une crue rapide monta en quatre heures, de plus de 3 pieds au dessus des précédentes inondations, noya le chantier, détruisit l’approvisionnement de ciment et toutes les pierres de taille entreposées pour terminer le pont, occasionnant de gros dégâts aux cintres en bois.
De plus, des tensions surviennent entre la maîtrise d’œuvre, représentée par H. Pitot, et le groupement d’entreprises.
Dans un rapport daté du 24 décembre 1743, rapporté en commission le 4 janvier 1744, Pitot regrette que les entrepreneurs n’exécutent pas eux mêmes les travaux et les sous-traitent.
Ainsi la première arche est faite par les uns, la seconde par les autres…ces procédés abusifs sont souvent très répandus dans la province, en Languedoc.
Par ailleurs, pour économiser les bois, les entrepreneurs n’établissent des cintres que pour la seule grande arche ; pour les autres arches surplombant le rocher à sec, ils préfèrent élever des piliers de pierre qu’ils abattront lorsque les voûtes seront formées.
On sait pourtant que cette pratique est très dangereuse pour les ouvriers lors du décintrement, les piliers provisoires ayant une tendance à tomber un peu au hasard !